L’Histoire, cette vieille courtisane, ne s’incline, elle aussi, que devant le succès.
( Ivan Vazov, poète, romancier et dramaturge, 1850 – 1921 )

Avec cette série de quatre conférences se termine la première partie du cycle consacré à l’Histoire de la Bulgarie et proposé à l’occasion de l’entrée de ce pays dans l’Union Européenne. Ce cycle s’achèvera, sauf accident, à l’automne prochain avec une autre série de cinq conférences sur la Bulgarie au XX e siècle, de 1918 à …2007.

Ces conférences portent sur une longue période, particulièrement douloureuse, qui a profondément marqué la mémoire de nos amis Bulgares. A plus de quatre siècles d’humiliations ont succédé des décennies d’un combat pacifique pour réaffirmer une identité nationale, bientôt accompagné par l’organisation de la lutte armée. Si celle-ci a échoué, compte tenu du rapport des forces en présence, le sacrifice accompli n’allait pas être vain puisqu’il ouvrit la voie à l’indépendance.

Peut-on rappeler que lorsque les Bulgares font leurs premiers pas dans un espace national libéré en 1878, ailleurs en Europe, les Polonais, les Tchèques, les Hongrois, les Baltes et les Finlandais attendront encore quarante ans (1918) avant de pouvoir devenir maîtres de leur destin ?

Mais ces mêmes quarante années, dont les Bulgares avaient tant attendu, furent aussi des années difficiles au cours desquelles le peuple bulgare paya, parfois très cher, cette indépendance.

Ce furent aussi des années au cours desquelles des écrivains, des peintres, des musiciens hissèrent une culture nationale renouvelée au niveau de leurs modèles européens.

Si la France fut peu présente aux côtés de la Bulgarie au cours des années décisives, de nombreux intellectuels bulgares, paradoxalement, se sont volontiers tournés vers elle…

René Meissel

Comme pour les précédentes, des documents élaborés spécialement pour leur illustration (cartes, chronologies comparatives, extraits de textes historiques, littéraires ou de témoignages écrits ) seront mis à la disposition des auditeurs au début de ces conférences.


Espace culturel bulgare

APPROCHES DE LA BULGARIE

Conférences de printemps
à 15 heures

les mercredis 25 avril, jeudi 10 mai et mercredi 23 mai,
mercredi 6 juin 2007
Entrée libre

28 rue La Boétie, 75008 Paris (métro : Miromesnil) Plan

courriel : contact@ccbulgarie.com;
http://www.ccbulgarie.com


Avril 2007

Madame, Monsieur,

Cette information s’adresse à toutes les personnes qui ont suivi jusqu’ici, en fonction de leurs disponibilités, le cycle de conférences que je donne sur l’Histoire de la Bulgarie à l’Espace culturel bulgare à Paris, 28. rue de la Boétie ; elle s’adresse aussi aux personnes qui n’ont pas pu le suivre mais qui ont eu connaissance du programme.

La conférence prévue initialement le mercredi 9 mai est reportée au jeudi 10 mai, même heure (soit 15h00). Le sujet porte sur la période fondatrice de la nation bulgare contemporaine, soit celle qui est désignée par l’expression Eveil ( ou Réveil) national et qui s’étend sur les trois premiers quarts du XIX e siècle. C’est une période passionnante, et j’ai intitulé cette conférence Comment devenir Bulgare au XIX e siècle ? Ce qui pourrait paraître provocateur à l’égard de nos amis Bulgares…mais j’ai eu l’occasion de la donner, sous ce titre-là, à Aix-en-Provence au début mars devant un public de Français bulgarophiles, de Bulgares et en présence d’universitaires bulgares sans blesser quiconque. Au contraire !

Si j’ai dû déplacer cette conférence, c’est pour répondre à une demande du Service culturel de l’ambassade de Bulgarie qui a souhaité que je redonne, le 9 mai, à l’Hôtel de Ville de Paris, dans le cadre d’une journée européenne, la conférence (avec projections de diapositives) intitulée Les églises bulgares et leur décor peint, du XI e au XIX e siècle : conservation et restauration d’un patrimoine. J’avais donné cette conférence à l’Espace Bernanos à Paris pour le compte de l’association Art et Eternité, puis à Senlis, avant de la donner à l’Espace Culturel bulgare en mai 2005. C’est avec plaisir que j’accepte de la reprendre.

Malheureusement, pour l’instant, rien ne m’a été confirmé et je n’ai aucune indication concernant le lieu exact et l’heure (voire les heures, s’il apparaît nécessaire de la doubler). Je conseille aux personnes intéressées de s’adresser à l’Espace culturel bulgare début mai (tél/fax : 01 43 59 20 52, e-mail : contact@ccbulgarie.com ou encore site : www.ccbulgarie.com) pour avoir des informations définitives sur la tenue de cette conférence…ou sa non-tenue…

Je me permets de rappeler la conférence prévue le mercredi 25 avril (Espace culturel, 15h00, entrée toujours libre) consacrée à la période ottomane : Les siècles sombres : « sous le joug ottoman » ou « à l’ombre du Croissant » ? Une période complexe et cruciale, dont l’histoire a été largement instrumentalisée par le régime communiste, comme elle l’est encore aujourd’hui par quelques groupes nationalistes. Une nouvelle génération d’historiens bulgares travaille à la relire avec…disons : plus de sérénité.

Veuillez agréer l’expression de mes sentiments cordialement dévoués,


Mercredi 4 avril, à 15 h 00, conférence :

La conquête ottomane, entre violence et tolérance.

La conquête de la Bulgarie par les Turcs ottomans s’est faite en une trentaine d’années par étapes successives. Son histoire est confuse : l’absence de sources écrites a embarrassé les premiers auteurs qui ont tenté de la reconstruire. Quelle a été l’attitude du dernier tsar face au conquérant, et quel a été son sort ? Quelle a été l’attitude des féodaux ? Pourquoi les deux expéditions militaires de l’Occident catholique ont-elles lamentablement échoué pour enrayer l’expansion ottomane et tenter, peut-être, de libérer des peuples chrétiens assujettis depuis si peu de temps ? Toute conquête armée est, par nature, violente, mais on fait volontiers crédit aux conquérants musulmans de se montrer, à l’exemple des Arabes en Espagne, tolérants envers les croyances et les pratiques religieuses des populations qu’ils soumettent…Que sait-on, dans la mesure du possible, du comportement des Ottomans dans le cas de la Bulgarie ?

Des documents élaborés spécialement pour l’illustrer (cartes, chronologies synchroniques, extraits de textes) seront mis à la disposition des auditeurs au début de la conférence.


mercredi 25 avril, à 15 h 00, conférence :

Les siècles sombres : « sous le joug ottoman » ou « à l’ombre du Croissant » ?

Les peuples asservis ont leur philosophie bien à eux qui les réconcilie avec la vie…Un peuple esclave, même sans espoir, ne se suicide jamais ; il mange, il boit et fait des enfants. Il s’amuse. Prenez la poésie populaire…Là, aux souffrances subies…se mêlent des agneaux gras cuits à la broche, des vins rouges pétillants, de la bonne eau-de-vie, des noces plantureuses, des rondes endiablées…les sources de chansons innombrables.

( Ivan Vazov, Sous le joug,  1889 )

Les Ottomans ont exercé leur domination pendant cinq siècles sur la Bulgarie, placée également sous l’autorité spirituelle du patriarcat grec. Trop proche d’Istanbul, isolée trois siècles durant, du reste de l’Europe par un immense glacis conquis par les Turcs depuis les abords de Vienne jusqu’à la Crimée, la Bulgarie dut , en outre, subir l’implantation de populations amenées d’Anatolie, voire d’Arménie. Sujets de seconde zone, parfois associés à la mise en valeur de leur territoire, parfois victimes des désordres de l’Empire ou de cruelles représailles, les Bulgares des campagnes ont tenu bon. Y a-t-il eu, ici ou là, islamisation forcée ou adhésion par intérêt à l’Islam ? La question fait débat…


mercredi 9 mai , à 15 h 00, conférence :

L’Eveil national : comment devenir Bulgare au XIX e siècle ?

L’esprit révolutionnaire, cet ange de feu, effleura de son aile ardente ardente aussi bien les porteurs de tsarvoulis* que les étudiants, les porteurs de bonnets de fourrure que les porteurs de fez, les coiffures coiffures de moines autant que les chapeaux…

( Ivan Vazov, Sous le joug, 1889 )

* tsarvoulis : mocassins en peau de porc des paysans bulgares

Depuis la fin du XVIII e siècle , la Russie orthodoxe avait atteint la Mer Noire, la Révolution Française avait parlé de nation et de liberté, puis les voisins grecs avaient fait leurs premiers pas d’hommes libres…1848 avait ébranlé la vieille Europe des monarchies…Peu à peu, les Bulgares ont retrouvé, encore balbutiante, leur histoire ; ils ont appris à lire et à écrire leur langue ; les réformes de l’Empire ottoman leur ont ouvert les frontières…Les plus jeunes se sont mis à rêver de Liberté et ils ont pris les armes. Dans cet espace multiethnique et multiculturel, face à un Empire encore puissant et à la vigilance de ses voisins, l’insurrection d’Avril 1876 ne pouvait être que sacrificielle. Mais le sacrifice n’allait pas être vain.


mercredi 23 mai, à 15 h 00, conférence : :

Aspirations bulgares et regards français : entre relations affectives et intérêts politiques.

Verbe subtil, puissant, trésor inestimable,
Produit du lent effort des générations,
Fruit mûri par les soins d’esprits infatigables,
Tu brilles d’élégance et de précision.

… Que de nobles esprits, formés à ton école,
Ont senti ton prestige et reconnu ton rôle,
Et te rendent l’honneur de leur fidélité ! …

(Lubomir Guentchev, Hommage à la langue française, 1975 )

La France de Napoléon III avait eu le souci de ménager l’Empire ottoman et de favoriser les actions du Vatican dans la confrontation avec l’Eglise russe ; après la défaite de 1870, elle a été longtemps à l’écart du jeu européen…Ce sont des entreprises françaises ( travaux publics et …parfumerie) qui se sont intéressées au développement du pays. Pourtant, dès les années 1840, l’enseignement du français figurait au programme de certaines écoles bulgares ; la première section de l’Alliance Française fut créée par un marchand d’essence de rose à Kazanlak dès 1901, celle de Varna quelques années plus tard par un ingénieur naval. Si les peintres bulgares, attirés par la modernité occidentale, ont complété leur formation à Munich ou à Vienne, les poètes se montraient particulièrement réceptifs à la sensibilité des symbolistes français.


mercredi 6 juin, à 15 h 00, conférence :

La Première Guerre mondiale : la Bulgarie sacrifiée.Dimtcho Debelianov

Qu’il est étrange dans le tumulte de ce sinistre orage,
Où tous ne font qu’un et chacun est si seul,
De se rappeler, de murmurer un vers qui pleure
Dans les douces élégies de Francis Jammes.

(Dimtcho Debelianov, né en 1887,  blessé mortellement sur le front de Grèce en 1916)

Pleinement indépendants depuis 1908, la Bulgarie et les Bulgares ont cru, après un nouvel affaiblissement de l’Empire ottoman et entente avec leurs voisins, pouvoir restaurer un espace national que l’Histoire venait de leur faire redécouvrir : la première guerre balkanique, en 1912, parut répondre à leur attente. C’était sans compter avec la complexité des situations et les appétits de leurs alliés : en 1913, elle dut affronter leur coalition à laquelle s’étaient joints la Roumanie et l’Empire ottoman. Deux ans plus tard, en 1915, le tsar jugea que la Bulgarie, chaînon manquant dans l’alliance entre la Turquie et les deux Empires centraux, avait tout à gagner à la rejoindre quand la triple Entente (France, Angleterre, Russie) accumulait les échecs. Malgré l’opposition populaire…Le prix à payer s’avéra très élevé.